CHAPITRE SEPT

 

 

Ils n’échangèrent pas un mot. D’un accord tacite, ils revinrent rapidement auprès des chevaux et les emmenèrent vers l’intérieur des terres par le sentier dans le bois, en attendant d’être assez loin du rivage pour pouvoir se remettre en selle. Si Heledd, après avoir passé la nuit à l’ermitage, avait vu le vaisseau des pillards avec son formidable arroi de guerriers, il ne fallait pas s’étonner qu’elle se soit hâtée de se mettre à bonne distance. De plus, il était quasiment sûr qu’elle s’était dirigée vers les terres aussi vite et aussi loin que possible, et une fois qu’elle serait hors de portée des pirates, elle chercherait certainement à se réfugier dans une ville. C’est ainsi du moins que n’importe quelle jeune fille raisonnable agirait en pareilles circonstances. Ici elle était à mi-chemin, entre Bangor et Carnarvon. Où choisirait-elle d’aller ?

— Un seul vaisseau, lança Mark enfin, quand le sentier s’élargit et leur permit de marcher de front. Ils sont complètement fous ! N’y aurait-il pas moyen de les affronter, de les capturer même ?

— En ce moment précis, oui, reconnut Cadfael, seulement voilà, il n’y a personne pour s’en charger. Ils ont dépassé Carnarvon de nuit, j’en jurerais, et ils fileront de nuit, une fois encore. Ce vaisseau est sans doute l’un des plus petits et des plus rapides de leur flotte. Avec à son bord plus de vingt rameurs armés, rien de ce que nous avons ne pourrait les suivre. Vous avez vu comment il est construit, on peut le manœuvrer à l’aviron dans tous les sens et il tourne dans un mouchoir. Le seul moment dangereux est celui où la plupart des marins descendent à terre pour se livrer au pillage. Ils abordent au rivage en un clin d’œil et ils reprennent la mer aussi rapidement.

— Mais pourquoi envoyer une seule embarcation ? A ce que l’on m’a raconté, ils attaquent toujours en force et s’emparent à la fois d’esclaves et de butin. Ils ne peuvent guère s’y risquer dans ces conditions, avança Mark.

— Cette fois, répondit Cadfael après réflexion, ce n’est pas pareil. Si Cadwalader les a amenés jusque-là, il a dû leur promettre monts et merveilles en récompense de leurs services. Ils sont ici pour persuader Owain qu’il a intérêt à restituer ses terres à son frère et ils espèrent être grassement payés en ce faisant. S’ils peuvent y arriver à moindre mal par la simple menace que suggère leur présence, sans perdre un seul homme, c’est leur manière favorite de procéder. Cadwalader n’y verra pas d’objection, à condition que le résultat soit le même. A supposer qu’il ait gain de cause et recouvre ses terres, n’oublions pas qu’il devra continuer à vivre près de son frère. Pourquoi envenimer leurs relations plus qu’il ne faut ? Je ne pense pas qu’ils mettent tout à feu et à sang, ni qu’ils prennent des esclaves, à moins que ça ne tourne au vinaigre.

— Alors pourquoi avoir envoyé un unique bateau, si loin, le long du détroit ? demanda Mark avec bon sens.

— Les Danois doivent nourrir leurs hommes et il n’entre pas dans leurs habitudes d’emporter leurs provisions de bouche quand ils vont dans un pays sur lequel ils pourront vivre sans bourse délier. Ils connaissent suffisamment les Gallois à présent pour savoir qu’on peut se contenter de pas grand-chose et qu’on voyage léger. En quelques heures, on a conduit dans la montagne familles et troupeaux. Ce petit vaisseau n’a pas perdu de temps pour filer vers l’intérieur des terres dès qu’il a abordé au rivage et razzier les petits villages qui avaient été prévenus un peu tard ou qui n’avaient pas rassemblé leur bétail assez vite. Cette nuit, ils rejoindront les autres, chargés de victuailles et de ce dont ils auront pu s’emparer de grains et de farine. C’est ce à quoi ils s’emploient activement le long de ces bois et de ces champs en ce moment précis.

— Et s’ils rencontrent une jeune fille seule ? interrogea Mark. S’abstiendront-ils de la mettre à mal malgré ce que vous m’avez expliqué ?

— En de telles circonstances, je ne me porterai garant de personne, Danois, Gallois ou Normand, admit Cadfael. S’il s’agissait d’une princesse de Gwynedd, elle aurait bien plus de valeur intacte et respectée que violée et maltraitée. Et si Heledd n’est pas de sang royal, elle n’a pas sa langue dans sa poche et elle saura bien leur expliquer qu’elle est sous la protection d’Owain Gwynedd, qu’ils auront donc à en répondre s’ils lui causent du tort. Même ainsi, remarquez…

Ils étaient arrivés à un endroit où le chemin forestier se scindait en deux, une branche s’enfonçant dans les terres en direction de l’ouest et l’autre allant plus franchement vers l’est.

— Nous devons être plus près de Carnarvon que de Bangor supposa Cadfael, s’arrêtant à l’embranchement. Seulement, le savait-elle ? Alors, Mark ? Est ou ouest ?

— La meilleure solution serait de se séparer, répondit-il, sans grand enthousiasme. Elle ne devrait pas être loin. Elle aura été obligée de rester à couvert. Si ce fichu bateau doit repartir cette nuit, elle aura peut-être trouvé à se cacher en attendant leur départ. Vous prenez d’un côté et moi je prendrai de l’autre.

— Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre contact, l’avertit Cadfael. Si on se sépare, ce ne peut être que pour quelques heures, et il faut qu’on se retrouve ici même. Nous ne sommes pas libres d’agir exactement à notre convenance. Bon, allez vers Carnarvon. Si vous la trouvez, mettez-la en sûreté. Sinon, revenez ici au crépuscule. J’agirai de même. Si je la croise sur ma route, je lui dénicherai un abri où je pourrai, je retournerai à Bangor s’il le faut. Je vous y attendrai, si je ne peux pas être au rendez-vous, ce soir. Donc, si je ne peux vous retrouver, rejoignez-moi là-bas.

Ce n’était pas le meilleur des arrangements, mais c’était le moins mauvais avec le temps qui leur manquait et leur devoir à remplir auquel ils ne pouvaient se soustraire. Elle avait quitté la cellule près du rivage pas plus tard que ce matin ; elle avait eu à se montrer prudente et à ne pas sortir des bois où un cheval doit marcher au pas. Non, elle ne pouvait pas être loin. Et à cette distance du détroit elle ne quitterait pas un sentier bien dessiné au lieu de se perdre sous les fourrés. Peut-être arriveraient-ils à la retrouver avant que la nuit tombe, pour la conduire dans un endroit sûr et être à l’heure au rendez-vous, avec un souci de moins avant de repartir, satisfaits, pour l’Angleterre.

Mark regarda le soleil qui n’était plus tout à fait à son zénith.

— Il nous reste quatre bonnes heures, dit-il, et là-dessus, il dirigea vivement son cheval vers le couchant et s’éloigna.

 

Le sentier, plutôt plat, que suivait Cadfael allait vers l’est sur peut-être un demi-mile, sortant brièvement de la forêt et laissant voir le détroit à travers le rideau clairsemé des arbres, plus bas. Puis il repartait vers les terres et commençait à grimper, même si la pente ici n’était encore très forte, car le terrain de ce côté du continent bénéficiait dans une certaine mesure de la fertilité de l’île d’en face avant de s’élever dans les montagnes. Il allait doucement, l’oreille aux aguets, s’arrêtant de temps à autre pour écouter plus attentivement, mais à l’exception du chant des oiseaux il n’y avait aucun signe de vie, mais eux ne s’intéressaient qu’à leurs occupations printanières et la folie des hommes les laissait indifférents. On avait conduit le bétail et les moutons plus haut, dans les collines, dans des enclos gardés ; les pillards ne trouveraient que quelques brebis égarées et peut-être ne s’aventureraient-ils pas plus loin le long du détroit. La nouvelle de leur arrivée devait désormais les précéder et ils avaient déjà amassé l’essentiel de leur butin. Si Heledd était allée de ce côté, elle ne courrait peut-être plus de danger.

Il venait de quitter une prairie et s’engageait dans une zone boisée plus élevée, pleine de broussailles et de taches dansantes de soleil à main gauche qui, à droite, s’épaississait en forêt, quand un orvet, tel un petit éclair gris-argent, traversa le chemin comme la foudre presque sous les sabots du cheval, pour disparaître de l’autre côté dans de l’herbe plus drue. L’animal fit un bref écart et laissa échapper un hennissement d’inquiétude, auquel, pas très loin, quelque part à droite, répondit un autre cheval, en signe de reconnaissance. Cadfael s’arrêta pour écouter avec attention, espérant qu’un autre hennissement lui permettrait de situer plus précisément d’où il venait, mais son espoir fut déçu. Celui qui s’était réfugié là-bas, nettement à l’écart du sentier, avait dû courir et apaiser sa monture. Un hennissement pouvait porter dangereusement loin sur la pente de cette colline.

Cadfael mit pied à terre et mena son cheval en main parmi les arbres.

Évitant de suivre une ligne droite afin de tomber sur l’endroit où, croyait-il, était l’autre voyageur, il s’arrêtait à chaque tournant pour écouter et bientôt, alors qu’il se trouvait parmi d’épais fourrés, il surprit un mouvement soudain de branches froissées. Malgré les précautions qu’il avait prises, on avait dû surprendre son approche. Quelque part, caché à proximité, on l’attendait, posté en embuscade.

— Heledd ! appela-t-il, très distinctement.

Le silence sembla gagner encore en profondeur.

— Heledd ? C’est moi, frère Cadfael ! Vous n’avez rien à craindre, il n’y a pas de Danois ! Allez ! Montrez-vous !

Elle sortit des fourrés qu’elle repoussait de la main afin de se porter à sa rencontre. C’était effectivement Heledd, tenant une dague à la main, qu’elle semblait toutefois avoir oubliée, pour le moment. Sa robe était toute froissée, passablement salie du fait de son passage dans les buissons, elle avait du vert sur les joues, car elle s’était tapie dans l’herbe et la mousse, son épaisse chevelure se déployait sur ses épaules, librement, d’un noir total ici dans l’ombre, tel un nuage nocturne. Mais le clair ovale de son visage montrait une détermination farouche, s’il l’avait fallu, elle aurait affronté son assaillant. Ses yeux, encore plus grands dans la pénombre, étaient d’un mauve très sombre. Derrière elle, parmi les arbres, il entendait le cheval piaffer, qui n’appréciait pas d’être seul en ces lieux inconnus.

— C’est vous ? s’étonna-t-elle et, avec un grand soupir, elle laissa retomber le long de son corps la main qui tenait le poignard. Comment m’avez-vous retrouvée ? Où est frère Mark ? Je pensais que vous étiez repartis depuis belle lurette.

— C’eût été normal, acquiesça Cadfael, profondément soulagé de la trouver si maîtresse d’elle-même, mais votre disparition en pleine nuit nous en a empêchés. Mark est sur la route deCarnarvon, à un ou deux milles de nous, lui aussi vous cherche. On s’est séparés à l’embranchement du sentier, ne sachant pas quelle direction vous prendriez. On a pensé que vous pourriez être à l’oratoire de Nonna. Le curé nous a dit que vous vous étiez dirigée par là.

— Alors, vous avez vu le bateau, murmura Heledd avec un haussement d’épaules résigné devant l’inévitable. Je devrais être dans les collines, à l’heure qu’il est, pour essayer de trouver les cousins de ma mère dans les bergeries, là-haut, que j’espérais voir encore chez eux dans les basses terres, mais mon cheval s’est mis à boiter. Il m’a paru préférable de me mettre à l’abri pour la nuit et de le laisser se reposer jusqu’au matin. Mais nous sommes deux, maintenant, reprit-elle, avec un sourire éclatant montrant qu’elle avait repris confiance, trois si on peut rattraper votre petit diacre. Et maintenant, où allons-nous ? Si vous m’accompagnez dans les collines, vous pourrez repartir vers la Dee sans encombre. Quant à moi, je ne retournerai pas chez mon père, le prévint-elle avec un éclair de défi dans ses yeux sombres. Il s’est débarrassé de moi comme il en avait l’intention. Oh ! je ne lui veux pas de mal, mais je ne me suis pas enfuie pour finalement revenir, épouser un homme que je ne connais pas ou finir dans un couvent. Vous pouvez toujours lui dire, ou charger quelqu’un d’autre de le faire, que je suis en sécurité chez les parents de ma mère et qu’il cesse de s’inquiéter.

— Vous allez d’abord vous rendre dans le premier abri sûr qu’on rencontrera, répondit fermement Cadfael, indigné comme il ne l’aurait certes pas été s’il l’avait vue terrorisée et en détresse. Après, quand tout ceci sera terminé, vous aurez tout loisir de vivre votre vie à votre convenance.

Il eut d’ailleurs le sentiment, en prononçant ces mots, qu’elle serait capable d’arriver à une solution originale voire remarquable dans ce domaine et qu’il lui serait égal de narguer le monde entier si c’était le prix à payer.

— Votre cheval peut-il marcher ?

— Je ne suis pas obligée de le monter, après, nous verrons.

Cadfael réfléchit un instant. Ils étaient à mi-chemin de Bangor et de Carnarvon, mais une fois qu’ils auraient repris le chemin du ponant, il était plus rapide d’aller à Carnarvon ; en le suivant, peut-être rejoindraient-ils Mark. Qu’il soit entré en ville ou qu’il soit revenu sur ses pas pour être à l’embranchement lors de leur rendez-vous au crépuscule, le long de ce sentier, ils ne manqueraient pas de le croiser. Dans une cité pleine des guerriers d’Owain, il n’y aurait pas de danger. Une force de mercenaires engagés pour terroriser n’irait pas jusqu’à provoquer toutes les forces de Gwynedd. Ils se livreraient peut-être au pillage, c’était assez distrayant de rafler quelques bêtes ou des paysans égarés, mais ils n’étaient pas fous au point d’entraîner une sortie de l’ensemble des troupes d’Owain.

— Allez le chercher, ordonna Cadfael. Vous monterez le mien et moi, je prendrai le vôtre en main.

Le regard noir qu’elle lui lança n’était pas vraiment une garantie qu’elle lui obéirait sans restriction et n’était pas de nature à le rassurer. Elle hésita quelques secondes pendant lesquelles le silence de cet après-midi sans vent prit une intensité considérable, puis, tournant les talons, elle retraversa les buissons et disparut, rompant la quiétude du lieu en s’enfonçant bruyamment sous le couvert des arbres. Il ne tarda pas à entendre l’animal hennir doucement, puis il y eut un mouvement dans les fourrés quand la cavalière et sa monture commencèrent à arriver en terrain découvert. Soudain, elle poussa un grand cri indigné, extraordinairement perçant.

D’instinct, il se précipita vers elle mais il ne put parcourir plus de deux pas. De part et d’autre les taillis s’écartèrent, des mains l’empoignèrent par son capuchon et son habit, lui immobilisant les bras, le laissant debout mais impuissant, luttant contre une étreinte qu’il ne parvenait pas à rompre mais qui, curieusement, se contentait de le maintenir sans essayer de lui causer de souffrance. Brusquement, la petite clairière se remplit d’hommes de haute taille, aux bras nus, aux cheveux blonds, ceinturés de cuir. Du bosquet en face de lui émergea un homme encore plus grand, un jeune géant dépassant Cadfael, qui était de taille moyenne, de la tête et des épaules, et riant si fort que les bois silencieux jusqu’alors résonnaient de sa bruyante gaieté. Il tenait fermement entre ses bras une Heledd folle de rage qui donnait des coups de pied et se débattait de toutes ses forces sans toutefois l’impressionner beaucoup. De la main qu’elle avait réussi à libérer elle imprima la marque de ses ongles dans la joue de son ravisseur et tirait tant qu’elle pouvait sur ses longs cheveux de lin jusqu’à ce qu’il se tourne, penche la tête et lui saisisse le poignet entre ses dents, de grandes dents blanches, égales, brillantes, qui marquaient à peine la peau douce d’Heledd. Ce fut si soudain qu’elle resta coite entre ses bras et que ses doigts crispés se détendirent progressivement. Mais quand il la lâcha pour se remettre à rire, la rage la reprit et elle se remit à frapper, vainement, des deux poings la large poitrine du Danois.

Derrière lui apparut un gamin ricanant d’une quinzaine d’années, tenant le cheval d’Heledd, qui évitait de trop s’appuyer sur un antérieur. En voyant un second cheval à l’attache, qui remuait nerveusement à l’orée du bois, le garçon poussa un grand cri de plaisir. En vérité les maraudeurs semblaient d’humeur joyeuse plus que menaçante. Ils n’étaient pas aussi nombreux qu’on aurait pu le croire a priori, du fait de leur taille et de leur présence d’une qualité presque animale. Ils étaient deux, avec des poitrines comme des barriques, des moustaches impressionnantes et des tresses blondes leur retombant de part et d’autre du visage, à tenir Cadfael par les bras. Un troisième avait saisi la bride du rouan, caressant le long chanfrein étoilé et la crinière crémeuse. Mais il y en avait d’autres, quelque part à découvert sur le chemin, que Cadfael entendait bavarder et aller et venir en attendant. L’étonnant était que ces grandes brutes puissent fondre sur leur proie sans le moindre bruit. En s’appelant mutuellement, les chevaux avaient attiré l’attention des pillards qui revenaient sur leurs pas, tombant ainsi sur un butin inattendu. Un religieux, une jeune fille dont les vêtements et la monture indiquaient la qualité et deux bons chevaux.

Le jeune géant surveillait ses gains sans perdre le nord ni se laisser troubler par les coups inefficaces que lui portait Heledd. Cadfael nota que s’il était assez rude envers sa captive, il n’était pas brutal. Apparemment Heledd aussi s’en était rendu compte, car elle cessa petit à petit de se défendre, sachant que c’était inutile, surprise aussi de voir qu’il n’en tirait pas vengeance.

— Saxon ? demanda-t-il dans sa langue, observant Cadfael avec curiosité.

Quant à Heledd, qui l’avait couvert d’injures en gallois jusqu’à ce que le souffle lui manque, il ne jugea pas utile de demander d’où elle était.

— Gallois ! répondit ce dernier. Comme la demoiselle. C’est la fille d’un chanoine de Saint-Asaph. Elle est sous la protection d’Owain Gwynedd.

— Il aime les chats sauvages ? s’écria le jeune homme, se remettant à rire avant de reposer la jeune fille sur ses pieds d’un mouvement souple tout en la maintenant fermement de son large poing par la ceinture de sa robe froissée. Je suppose qu’il voudra la récupérer sans qu’on ait touché un cheveu de sa tête ? Mais ou je me trompe fort ou elle a cassé sa laisse, sinon que fabriquerait-elle dans un endroit pareil sans autre garde du corps qu’un moine bénédictin ?

Il employait un curieux mélange d’erse, de danois et de gallois qui lui permettait de se faire parfaitement comprendre dans la région. Les contacts tissés depuis des siècles entre Danois et Saxons n’avaient pas tous été placés, et de loin, sous les auspices des invasions et autres razzias. De nombreux mariages avaient été contractés entre les principautés, et des liens commerciaux, fructueux pour les deux partis, avaient été tissés. Ce jeune homme devait aussi connaître un peu le français parlé en Normandie, voire même le latin, car les moines irlandais l’avaient probablement eu comme élève. Heureusement il n’avait rien non plus d’un soudard et ne tenait vraisemblablement pas à se priver d’un avantage qui pourrait s’avérer payant.

— Amenez l’homme et ne le laissez pas échapper, ordonna-t-il. Owain a du respect pour l’habit noir, même si l’Église celte lui convient mieux. S’il faut marchander, la sainteté, ça va chercher un bon prix. Moi, je me charge de la fille.

On s’empressa d’exécuter ses ordres, d’un cœur léger, semblait-il, car c’était leur chef, et chacun était très heureux de ce qui lui était échu. Quand avec leurs prisonniers ils arrivèrent à découvert, les deux chevaux suivant derrière, il ne fut pas difficile de comprendre pourquoi ils étaient d’humeur folâtre. Quatre de leurs compagnons les attendaient, tous à pied, portant deux longs bâtons chargés de dépouilles d’animaux, arrachés à des troupeaux éparpillés qui étaient allés paître, et même à la forêt car il y avait aussi du gibier. Un cinquième s’était fabriqué un joug de bois pour porter deux outres pleines de vin. Il devait y avoir au moins deux groupes à terre, estima Cadfael, car le petit vaisseau comprenait douze paires d’avirons, sans parler du second équipage. On ne pouvait que supposer le nombre de Danois que comprenait ce groupe, mais pendant un jour ou deux ils ne risqueraient pas de mourir de faim !

Il ne tenta pas de résister, car il se rendait bien compte qu’il n’était pas de taille en face d’un des solides guerriers qui l’encadraient, que même s’il arrivait à s’échapper, il ne pourrait jamais emmener Heledd avec lui.

En tant qu’otages, ils étaient précieux et, où qu’on les emmène, il pourrait toujours lui fournir protection et compagnie jusqu’à un certain point. Il ne la croyait déjà plus vraiment en danger sérieux. Il s’était simplement confirmé ce qu’il avait pensé en avançant l’idée qu’elle avait de la valeur. Il ne s’agissait pas d’une guerre ouverte mais d’une opération de type commercial où l’enjeu était de gagner gros à moindres frais.

Le butin amassé avait été en partie redistribué, et on utilisa la monture d’Heledd pour porter une part de la charge. Ces hommes étaient étonnamment vifs et économes de leurs mouvements, évitant de trop fatiguer un animal de valeur et répartissant les poids. Entre eux, ils recommencèrent à parler norois. Il y avait cependant gros à parier que ces jeunes guerriers vigoureux étaient nés dans le royaume de Dublin, et leurs pères avant eux, qu’ils avaient donc une bonne connaissance des langues celtes qui se pratiquaient autour de leur territoire et qu’ils les parlaient très correctement en guerre comme en temps de paix. A la fin de cette journée de pillage, ils ne perdaient pas le soleil de vue et, à l’exception de l’intermède qui venait d’avoir lieu, ils évitaient de perdre du temps.

Cadfael s’était demandé comment le chef utiliserait le cheval sain, s’attendant ce qu’il réclame le privilège de le monter lui-même. Au lieu de cela, il ordonna au gamin de sauter en selle et plaça Heledd devant lui. Il avait beau n’avoir que quinze ans, il était suffisamment fort pour qu’elle ne lui glisse pas entre les doigts une fois qu’il lui eut solidement attaché les mains avec sa propre ceinture. Elle avait à présent compris que toute résistance serait vaine et manquerait de dignité. Elle se laissa installer contre la large poitrine de l’adolescent sans daigner se défendre. A voir l’expression déterminée de son visage, elle sauterait sur la première occasion de s’évader et préférait garder ses forces et toute sa tête en réserve jusqu’à ce que le moment favorable se présente. Elle ne disait mot, les dents serrées sur son angoisse ou sa colère, observant une attitude digne et méditative, mais ce qui se passait derrière ses traits impassibles, bien fort qui pourrait le deviner.

— Si vous tenez à cette jeune fille, mon frère, s’écria le jeune homme, se tournant vivement vers Cadfael, toujours encadré par ses deux cerbères, vous pouvez marcher librement à côté d’elle ! Mais je vous préviens, Torsten vous suivra comme votre ombre. Il arrive d’un jet de lance à fendre un jeune arbre à cinquante pas, alors pas de geste inconsidéré !

Il lança cet avertissement avec un petit sourire, comme s’il savait déjà que ce dernier n’avait nulle intention de prendre ses jambes à son cou en laissant la fille captive.

— Allez en avant, maintenant, s’écria-t-il gaiement et plus vite que ça !

C’est lui qui donna l’exemple, et la petite troupe s’ébranla en file indienne derrière son chef. Cadfael suivit le mouvement, tout près de son propre rouan, tenant d’une main l’étrivière du cavalier. Si Heledd avait besoin du peu de réconfort que lui apportait sa présence, tant mieux pour elle, mais Cadfael était rien moins que convaincu de ce besoin. Elle n’avait pas bougé depuis qu’on l’avait hissée en selle, sauf pour essayer de trouver une position plus confortable, et la tension même de son visage s’était apaisée, adoucie, laissant place à un calme rêveur. A chaque fois que Cadfael levait les yeux pour la regarder de nouveau, il constatait qu’elle s’habituait de mieux en mieux à cette situation inattendue. Et à chaque instant, son regard à elle se posait, songeur, sur celui qui les dépassait tous de la tête, et marchait devant eux, très droit, ses longs cheveux blonds voletant dans la brise légère.

Ils descendirent la colline d’un bon pas, traversant des bois et des prairies, jusqu’aux premières lueurs argentées de la rivière filtrant à travers la dernière zone boisée. Le soleil s’inclinait doucement vers l’ouest, dorant les vaguelettes poussées par le vent à la surface de l’eau, quand ils arrivèrent sur le rivage. Les hommes d’équipage laissés de garde les accueillirent à grands cris et amenèrent le drakkar à la côte pour les prendre à bord.

 

Frère Mark, qui rentrait bredouille de son incursion vers l’ouest et ne voulait pas manquer l’heure du rendez-vous, entendit passer une petite troupe, rapide et silencieuse. Ils le précédaient de quelques toises et se dirigeaient vers le rivage. Il évita de se montrer, attendant qu’ils soient partis, puis il les suivit prudemment, comptant simplement s’assurer qu’ils étaient hors de portée avant d’aller rejoindre Cadfael. Il se trouva que la direction qu’il suivait parmi les arbres, vers le bas de la colline, croisait le sentier à découvert et l’amena plus rapidement à proximité de la colonne, si bien qu’il dut s’arrêter de nouveau, mais il les vit entre les branches qui avaient presque pris leur ampleur estivale, le jeune homme aux cheveux de lin qui était en tête, des guerriers portant des quartiers de viande et de venaison, puis Heledd et un adolescent qui semblaient flotter à six pieds du sol, le rythme de leur marche supposant la présence d’un cheval et enfin une tonsure qui marchait toute seule, une tonsure brun-roux où se mêlaient bon nombre de cheveux gris. Un petit indice, mais il n’en fallut pas plus à Mark pour reconnaître Cadfael.

Ainsi il l’avait trouvée, mais des étrangers indésirables les avaient capturés avant qu’ils n’aient eu le temps de se mettre en lieu sûr. Il ne restait plus qu’une seule solution à Mark, les suivre pour voir au moins où on les conduirait et comment on les traitait ; ensuite il veillerait à transmettre la nouvelle à ceux que cela intéresserait et qui s’occuperaient de dresser des plans pour les libérer.

Il mit pied à terre et laissa son cheval à l’attache pour pouvoir se déplacer plus vite et plus discrètement entre les arbres. Mais les hurlements qu’il ne tarda pas à entendre en provenance du bateau l’amenèrent à rejeter toute prudence et à sortir du couvert. Il courut vers le bas de la colline pour trouver un endroit d’où il pourrait observer les eaux du détroit et l’homme de barre qui amenait son embarcation près du rivage où l’herbe poussait dru. De là, c’était un jeu d’enfant de sauter à bord en enjambant le bastingage bas pour parvenir au banc des rameurs au milieu du vaisseau. Il les vit, farouche marée humaine blonde, s’engouffrer dans le bateau en caressant le cheval de bât pour l’amener à monter. Cadfael fut bien obligé de les suivre, mais à son allure, Mark crut déceler que la situation ne lui déplaisait pas outre mesure. Il n’avait certes pas le choix mais un autre que lui aurait montré moins d’adresse.

Sur son cheval, le garçon maintint fermement Heledd en attendant que le jeune géant, qui avait surveillé l’embarquement de ses hommes, vienne la prendre dans ses bras sans plus de difficulté que s’il s’était agi d’un enfant, et il sauta avec elle entre les bancs de nage. Après l’avoir reposée sur ses pieds, il tira sur la bride de la monture de Cadfael, lui parlant doucement pour l’inciter à le suivre, ce qui ne manqua pas de surprendre Mark. Le garçon suivit le mouvement et aussitôt l’homme de barre éloigna le navire du rivage, quant à ceux qui avaient le butin, ils se rendirent en bon ordre, sans délai, à leurs rames. Bientôt le petit drakkar se retrouva au milieu du courant. Il avait pris la mer avant que Mark soit revenu de son étonnement et, sinueux comme un serpent, piquait au sud-ouest en direction de Carnarvon et d’Abermanai où sans aucun doute leurs compagnons étaient au port ou amarrés à l’abri des dunes. Comme l’avant et l’arrière étaient interchangeables, il n’eut pas à tourner. Sa vitesse lui permettait de se tirer d’affaire en n’importe quelle circonstance. Même s’il était vu de la ville, Owain ne possédait aucun bâtiment capable de le rattraper. La rapidité avec laquelle il s’éloigna silencieusement jusqu’à ne devenir qu’un point à l’horizon des flots laissa Mark pantois, le souffle coupé.

Il repartit vers l’endroit où il avait attaché son cheval et fila à toute allure vers l’ouest et Carnarvon.

 

Cadfael, qu’on avait fourré à bord entre les bancs de nage où on l’avait laissé choir assez cavalièrement, prit un moment pour s’adosser aux planches de l’étroit gaillard d’arrière et réfléchir à la situation. Les relations entre les prisonniers et leurs ravisseurs s’étaient vite montrées fort acceptables, sans cris, pleurs ni grincements de dents. Toute résistance était inutile. Le bon sens suggérait aux captifs de se montrer raisonnables, ce qui laissait à leurs gardiens tout loisir de se pencher sur le problème plus immédiat de ramener sans dommage leur butin au camp sans sévérité excessive à leur égard. Un vaisseau qui voguait toutes voiles dehors en les éloignant rapidement du rivage était une garantie suffisante. Une fois qu’ils eurent embarqué, personne ne porta la main sur Cadfael, personne ne prêta attention non plus à Heledd, appuyée dans une attitude de défi à l’habitacle de la poupe où le jeune Danois l’avait installée, les genoux sous le menton, les jupes tirées autour d’elle. Personne ne craignait qu’elle ne saute à l’eau et se mette à nager vers Anglesey. Les Gallois, c’était bien connu, ne s’étaient pas taillé une réputation pour leurs prouesses natatoires. Il n’y avait rien à gagner à se montrer insultants envers eux ; ils représentaient de simples avantages qu’on utiliserait éventuellement plus tard.

Histoire de voir ce qu’il en était, Cadfael s’avança jusqu’au milieu du bateau, entre les provisions de bouche et le butin, s’intéressant à la construction du long vaisseau, sans qu’aucun rameur ne cherche à vérifier où il allait ou tourne la tête vers lui. Le drakkar, fin comme un lévrier, était conçu pour la vitesse. Dix-huit pas de long sur trois ou quatre de large au maximum, un seul mât, abaissé à l’arrière. Il nota les rivets qui maintenaient les virures ensemble. Avec sa conception, son faible tirant d’eau et sa légèreté qui ne réduisaient ni sa puissance ni sa rapidité, ses deux extrémités identiques lui permettant de manœuvrer instantanément, c’était le bâtiment idéal pour s’approcher au plus près des dunes d’Abermanai. C’était suffisant pour ce qu’ils avaient à transporter ; sinon ils auraient amené des péniches, plus lentes, dépendant davantage de leurs voiles et qui ne disposaient que de quelques rameurs si un problème se présentait avec le vent. Un gréement carré, comme pour tous les navires qui croisaient dans les eaux du nord. Les deux mâts du gréement latin de la mer du milieu, qu’il n’avait pas oubliée, étaient encore inconnus à ces corsaires venus du septentrion.

Il s’était trop profondément penché sur ses observations pour se rendre compte qu’on l’observait lui-même. Deux yeux bleus très pâles, sagaces, sous des sourcils dorés, interrogateurs, étaient posés sur lui. Rien n’avait échappé au jeune capitaine de cette razzia, qui savait manifestement ce qu’on pensait de son bâtiment. Il quitta brusquement le poste de pilotage pour rejoindre Cadfael dans le puits.

— Vous vous y connaissez en bateaux ? demanda-t-il, intéressé et surpris de rencontrer ce genre de préoccupations chez un moine bénédictin.

— Dans le temps, oui. Mais je ne me suis pas aventuré en mer depuis belle lurette.

— Vous connaissez la mer ? poursuivit le jeune homme, curieux autant que ravi.

— Non, pas celle-là. Mais il y a des années, je connaissais bien la mer du milieu et les rivages de l’Orient. Je suis entré au couvent à un âge avancé, expliqua-t-il, regardant les yeux bleus s’ouvrir tout grand sous l’effet de la surprise et briller d’une lueur plus chaleureuse.

— Eh bien, mon frère, je m’attendais à tout sauf à ça ! s’écria le jeune Danois avec chaleur. J’aimerais bien vous garder pour vous connaître mieux. Les moines qui savent la navigation, ça ne court pas les rues. Vous êtes le premier que je rencontre. Quel est votre nom ?

— Cadfael. Moine à l’abbaye de Shrewsbury, né au pays de Galles.

— Un nom pour un nom, voilà un marché équitable. Je me nomme Turcaill, fils de Turcaill, parent d’Otir, qui conduit cette expédition.

— Et vous savez ce qui motive cette dispute qui concerne deux princes gallois ? Pourquoi venir vous fourrer entre le marteau et l’enclume ? demanda Cadfael, avec bon sens.

— Pour l’argent ! répliqua gaiement Turcaill. Mais même sans être payé, je ne serais pas resté derrière quand Otir prend la mer. On s’ennuie à rester à terre. Je ne suis pas un terrien, moi, pour m’échiner sur une ferme, année après année, et me contenter de regarder pousser mes récoltes.

Non, cela Cadfael le croyait volontiers, et il n’était pas non plus du genre à prendre l’habit quand le feu de la jeunesse se serait apaisé. Avec son corps splendide qui rayonnait d’une énergie animale, ce serait grand dommage qu’il ne se marie pas et reste sans descendance. Il élèverait de nouvelles générations d’aventuriers, infatigables comme la mer sans repos, prêts à faire leur chemin dans n’importe quelle querelle au prix de leurs propres vies.

Il s’était éloigné maintenant, avec une bourrade amicale sur l’épaule de Cadfael, la démarche ferme malgré le tangage pour rejoindre Heledd, sur le gaillard d’arrière. La lumière commençait à devenir crépusculaire, mais elle n’en permit pas moins à Cadfael de voir la moue dédaigneuse qui plissa les lèvres d’Heledd et l’arc glacial de ses sourcils quand elle tira le bas de sa jupe pour éviter tout contact avec l’ennemi. Elle détourna la tête, refusant même de lui accorder un regard.

Turcaill rit, pas mécontent, il s’assit près d’elle et sortit du pain de la poche qu’il portait à la ceinture. Il le rompit de ses grandes mains douces et lui en offrit la moitié. Elle refusa. Sans se vexer, ni cesser de rire, il lui prit une main de force et lui fourra son offrande au creux de la paume, l’obligeant à refermer son autre main dessus. Elle ne pouvait pas l’en empêcher et n’allait pas lui donner le plaisir d’une résistance vaine. Mais quand il se leva et la laissa tranquille, s’éloignant sans un regard en arrière, elle ne jeta pas le morceau de pain dans les eaux noires du détroit ni ne le porta à sa bouche, montrant par là qu’elle l’acceptait, mais elle resta à la même place, le gardant serré et suivant l’homme qui s’éloignait d’un regard étroit, calculateur que Cadfael fut incapable d’interpréter, mais qu’il trouva à la fois inquiétant et bizarre.

 

A la tombée de la nuit, dans ce crépuscule qu’ils traversaient rapidement en silence, où seules de faibles lueurs phosphorescentes doraient l’extrémité des rames, ils longèrent les lumières des rives de Carnarvon avant d’arriver à un vaste bassin séparé de la haute mer par deux simples dunes de sable moutonnantes, couronnées d’épais buissons et de quelques arbres clairsemés. Sur l’eau se dessinaient les ombres mouvantes des vaisseaux dont certains avaient des mâts qu’on pouvait escalader ; d’autres, fins et bas, étaient comme le serpent que pilotait Turcaill. Espacées le long de la berge, les torches des avant-postes danois brûlaient claires dans l’air immobile ; plus haut, vers la crête luisaient les feux du camp des pirates.

Les rameurs de Turcaill donnèrent un dernier coup d’aviron prolongé et rentrèrent leurs rames tandis que d’un mouvement coulé le pilote amena le navire à la côte. Les Danois sautèrent par-dessus bord, hissant leur butin, et ils pataugèrent pour parvenir sur la terre ferme, où ils retrouvèrent leurs camarades de garde au tournant de la marée. Heledd aussi descendit à terre, légère comme une plume entre les bras de Turcaill. Cette fois, elle n’essaya pas de résister, toute tentative étant vaine, préoccupée surtout de préserver sa dignité.

Quant à Cadfael, il n’avait pas d’autre solution que de suivre tout ce beau monde, même si deux rameurs ne l’avaient pas invité expressément à descendre entre eux deux, et il regagna la rive fermement tenu aux épaules. Quelles que fussent les chances qui s’offraient à lui, il n’était pas question de s’enfuir sans emmener Heledd avec lui. Il arpenta donc avec philosophie les dunes et pénétra dans le périmètre gardé du camp, se laissant conduire sans discuter, ne doutant pas que le cercle de ses gardiens s’était refermé derrière lui.

L'Été des Danois
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